Mgr Adolphe Proulx – vers une société juste et solidaire

En préparation à la Première Journée mondiale des pauvres, le 19 novembre 2017,  nous présentons un texte en trois partis sur Mgr Adolphe Proulx,  le deuxième évêque du diocèse de Hull (maintenant l’Archidiocèse de Gatineau), et un homme engagé sur les questions de justice sociale. Voici le deuxième de trois extraits : Mgr Adolphe Proulx – vers une société juste et solidaire.


Qu’est-ce qu’une société juste et solidaire pour Mgr Proulx?  C’est d’abord une société qui repose sur le principe du respect de la dignité de la personne dans son intégralité. Mgr Proulx tirait la substance de ses interventions publiques d’une vision très nette de ce que devrait être une société qui accorde aux personnes la première place. Dans cette perspective, il se situe en droite ligne avec la doctrine sociale de l’Église qui place parmi ses principes de base la solidarité avec les démunis et les sans-voix et le respect de la dignité de la personne humaine dans toutes ses dimensions, personnelle, sociale et économique (COM, no. 82, p. 45). C’est pourquoi il s’est intéressé avec tant d’insistance aux personnes âgées et aux personnes malades, aux jeunes, à toutes les victimes des crises économiques, aux réfugiés, aux familles et aux femmes en particulier.

En ce sens, on peut dire de lui qu’il est un humaniste chrétien intégral et solidaire, qualificatif que l’on utilise aussi pour décrire la doctrine sociale de l’Église. “Quand nous parlons de libération, nous voulons embrasser toute la personne et tous les aspects qui peuvent l’aider à grandir et à s’épanouir”, écrit-il en 1985. (VSV, p. 162). Cette vision, il l’emprunte à ce qu’il appelle “notre héritage chrétien” (VSV, p. 162).

Héritage que l’on peut d’abord identifier par ses sources scripturaires, tant dans la Première Alliance que dans la Nouvelle. Dans ses écrits sur le sujet et en raison de sa fine connaissance des Livres saints, Mgr Proulx se révèle plus d’une fois comme un commentateur aussi érudit que sage. 

“Si Dieu veut la vie, il veut les conditions nécessaires à la vie”. Mgr Proulx en appelle à la mission prophétique telle qu’exprimée maintes fois dans l’Ancien Testament pour appuyer ses prises de position (VSV, p. 154).

Pour ce qui est de la Nouvelle Alliance, Mgr Proulx explique ce qu’il faut comprendre par l’expression “la vie en abondance”. “Parce qu’il est venu accomplir les promesses annoncées, Jésus se devait de proclamer l’arrivée des temps nouveaux dans des termes de “plus” lui aussi. “Il est venu pour la vie” comme le dit un chant populaire dans des groupes chrétiens. En Jean 10, Jésus se compare au Bon Pasteur qui est venu pour que ses brebis aient la vie et l’aient en abondance” (VSV, p. 155).

Il cite évidemment Matthieu 25, 31-46, pour faire voir comment Jésus s’est identifié aux pauvres. Son interprétation du texte est fort judicieuse lorsqu’elle insiste sur le verbe “faire” et non pas sur le pauvre en tant que “ré-incarnation” de Jésus.


Il met de l’avant une conception de l’Église servante et pauvre au service des plus pauvres. Ses écrits (voir VSV, p. 157) ne vont pas sans rappeler le Père Congar qui publiait dans les années 1960 son opuscule “Pour une Église servante et pauvre” et plus près de nous, le pape François qui, dans “La Joie de l’Évangile”, nous parle d’une Église pèlerine, d’une Église en sortie.

 “C’est dans ce sens qu’il faut comprendre le désir qui s’est fait de plus en plus pressant, ces dernières années, de voir l’Église devenir davantage “servante et pauvre”: on la veut pauvre non pas parce que la pauvreté ou la misère est une bonne chose en soi, on la veut pauvre afin qu’elle soit plus libre, plus détachée, plus capable de porter une attention toute particulière aux plus démunis de la communauté, comme Jésus le demande” (VSV, pp. 157-58).


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Il s’intéressait à toutes les victimes, sans oublier celles des sociétés oppressives et marquées par l’injustice sociale à l’interne et dans les rapports sociaux et économiques internationaux.  Par exemple, le Salvador, pays qui a fait l’objet d’une grande sollicitude de sa part et sur lequel il s’est prononcé à plusieurs reprises afin de défendre son peuple alors opprimé sous le couvert de l’idéologie de la sécurité nationale. Fidèle au magistère social de l’Église, il conçoit la paix comme une conséquence de la justice à l’intérieur et entre les nations.